Pour un sursaut solidaire face à l’urgence sociale : Réflexions de Priscilla Zamord
14/04/2020

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Pour un sursaut solidaire face à l’urgence sociale

Des inégalités sociales dévastatrices

Comment allez-vous ? Voilà une question qu’il est bon d’entendre en temps de crise planétaire. Comment va Myriam, caissière au supermarché à temps partiel et qui vit seule avec ses enfants dans une tour allée de Brno ? Comment va Ahmed intermittent du spectacle qui vient de fêter ses 22 ans via Skype dans son studio de 25 m2, faute de moyens pour rejoindre son père à Toulouse avant le début du confinement ? Comment va Hoshi, aide à domicile d’origine japonaise en lutte pour que son employeur daigne enfin lui remettre ses documents pour activer son droit au chômage ? Comment vont Raymond et Geneviève, ce couple de retraités qui reçoit son colis alimentaire préparé par 5 professionnel-les associatif-ves et 150 bénévoles dans les écoles Volga et Trégain ?

Ne l’oublions pas : 14% des Français-es et 10% des Rennais-es vivent encore sous le seuil de pauvreté. Et en période de confinement, ce qui ne change pas, ce sont les inégalités sociales. Au contraire, elles s’aggravent. Depuis le début de la pandémie, les fonctions vitales de la France, de Rennes sont assurées majoritairement par les salarié.es les plus précaires dont beaucoup de femmes. En quarantaine, les pertes de salaires et les logements exigus sont dévastateurs. La situation des personnes à la rue et des personnes sans-papier s’avère également très préoccupante.

Hier le monde pour celles et ceux qui subissent de plein fouet les inégalités était déjà violent, aujourd’hui nous tous-tes sommes sidéré-es et demain, que ferons-nous ?

Expérimenter le Revenu Minimum Garanti à Rennes

À long terme, nous sommes convaincue-es que le revenu universel procurerait à de nombreuses personnes le soutien nécessaire et l’autonomie pour répondre aux besoins vitaux, pour se former, pour trouver une activité épanouissante, pour développer des solutions solidaires à la crise.

À l’heure de la pandémie, le gouvernement allemand propose un revenu universel d’urgence de 1000 Euros par mois pendant 6 mois. Le gouvernement espagnol va également mettre en place un revenu de base d’urgence, 440 Euros par mois pour les personnes les plus fragilisé-es. Aux États-Unis, le versement d’un montant de 1000 Dollars aux américain-es les plus pauvres avec, en plus, environ 500 Dollars supplémentaires pour les enfants est en cours de réflexion.

En France, avant de quitter le PS, Benoît Hamon proposait, lors de sa campagne présidentielle en 2017 avec Yannick Jadot, une version d’un revenu universel. L’idée consistait à verser d’une manière automatique et inconditionnelle une somme s’élevant jusqu’à 600 Euros à 19 millions de personnes gagnant moins de 2812 Euros brut par mois.

Le gouvernement d’Emmanuel Macron planchait avant la crise sanitaire sur une fusion d’une dizaine d’aides sociales (RSA, allocation chômage, APL, etc.) au sein d’un revenu universel d’activité qui serait ni inconditionnel, ni totalement universel, ni cumulable avec d’autres revenus. Mais derrière cette mesure macroniste, il y a bien entendu un loup : celui de faire des économies.

Nous, les écologistes, sommes pour un revenu universel tel que le Mouvement français le propose. Nous voulons agir à Rennes et rapidement par la mise en place d’un revenu minimum garanti qui s’inscrit dans une démarche globale. Nous continuons de revendiquer l’urgence de ce revenu minimum garanti pour les plus démuni-es en s’appuyant sur l’expérience de la Mairie écologiste de Grande-Synthe. Travailleurs-es précaires, petit-es pensionné-es, jeunes de moins de 25 ans sans ressources, nous voulons garantir un droit de vie digne pour les habitant-es les plus pauvres. Par ailleurs, le revenu minimum garanti est aussi un outil de lutte contre le non-recours aux aides sociales (20% des personnes éligibles au RSA ne le demandent pas).

Nous avions identifié dans notre programme trois sources de financement possibles pour un scénario de 900 Euros par mois pour les ménages les plus démunis : 2 millions d’Euros issus des économies d’énergie, 1 million d’Euros issus d’une taxe de séjour sur les hôtels de luxe et la réaffectation budgétaire de 500 000 Euros (par exemple : le budget alloué à l’exposition Pinault aux Couvent des Jacobins). L’urgence sociale nous amène à porter cette solution et à l’adapter à la nouvelle réalité issue de la crise. Nous y travaillons.

La coopération au service des plus fragilisé-es

Ne l’oublions pas non plus, avant la crise sanitaire, notre société était en plein burn-out social, écologique et démocratique. Le changement de paradigme et de gouvernance pourra se faire avec la puissance citoyenne et populaire, les entreprises alliées de la transition écologique, des services publics centrés sur l’accès aux droits des habitant-es et, bien sûr, les associations.

La coopération entre les associations de notre territoire Utopia 56, Coeurs résistants, Un toit c’est un droit, le Secours populaire, pour ne citer qu’elles, et les services publics, permet de venir en aide aux plus démuni-es et aux personnes à la rue, y compris les exilé-es. Comme les soignant-es, ces dernières années, les équipes associatives ont été malmenées avec l’abandon progressif des emplois aidés, et sont toujours plus sollicitées par les pouvoirs publics. Mais une fois encore, des associations démontrent toute la puissance solidaire malgré les risques sanitaires et la désorganisation des services de l’État souvent hors sol. Au delà de la parenthèse coopérative avec les services publics et les louanges politiques faites sur la qualité des bénévoles et des travailleurs sociaux, que se passera-t-il après ? Les moyens associatifs et le renforcement des services nationaux et locaux dédiés à la solidarité seront-ils à la hauteur ? Car de toute évidence, à l’issue du confinement, nous aurons de plus en plus de Rennaises et de Rennais en situation de pauvreté et de personnes sans logement. Nous devrons également répondre aux habitant-es qui basculent soudainement dans la précarité et qui ne connaissant pas forcément leurs droits.

Nos objectifs écologistes sont toujours clairs : une solidarité ambitieuse et coopérative pour l’égalité de droit, zéro personne à la rue, un soutien renforcé aux associations et aux nouvelles formes d’activités responsables par la création d’un revenu de transition écologique ainsi que l’expérimentation d’un revenu minimum garanti.

Cette crise planétaire doit désormais devenir le déclencheur d’innovations solidaires concrètes, courageuses et durables. Nous, les écologistes, nous étions prêt-es, nous le sommes toujours.

Priscilla Zamord, engagée au sein de Choisir l’écologie pour Rennes.